SANTE DES PLANTES

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Crédit L. Fourrié

  • GESTION GLOBALE DE L'’AGROSYSTÈME :

=> Créer un environnement favorable aux cultures et à leurs auxiliaires

Le principe fondateur de la production biologique étant de ne pas avoir recours aux produits issus de la chimie organique de synthèse pour la gestion des adventices, des bio-agresseurs (ravageurs, pathogènes) et pour la fertilisation, il est nécessaire d’envisager différemment la façon de produire, notamment en basant la production non pas sur l’usage de produits curatifs, mais sur la prophylaxie et sur les principes de base de l’agronomie : mise en place de rotations longues, associations culturales, amendements et engrais organiques…
L’objectif est de créer des conditions propices au développement des cultures et défavorables à celui des
bio-agresseurs et des adventices, c'est-à-dire chercher à recréer dans le système agricole, les équilibres écologiques dynamiques qui existent dans la nature.


Tous les éléments vivants (plantes, animaux) et inertes (sol, eau, air) étant en interaction, il est essentiel de considérer le système agricole (ou agro-système) dans sa globalité : cultures, sol, environnement de la parcelle, et d’agir sur plusieurs paramètres en tenant aussi compte des influences de l’environnement extérieur à la ferme (cultures et pratiques culturales du voisinage, paysage…). Ainsi, face à une prolifération de bio-agresseurs, le raisonnement n’est plus : « quel produit va permettre de les éliminer ? », mais plutôt « comment est-il possible de restaurer un équilibre ?», et donc d’enrayer la prolifération, même si dans certains cas le recours à un bio-pesticide peut être utile pour « sauver » la récolte en attendant que des
équilibres se remettent en place.

Par définition, un système agricole productif, même peu intensif, est déséquilibré puisqu’on favorise une espèce (la culture) au détriment de toutes les autres. Plus le système est artificialisé (faible biodiversité naturelle) et monocultural (faible biodiversité cultivée), dans l’espace (monoculture) et dans le temps (rotation courte voire inexistante), plus les risques de prolifération des ravageurs et des maladies sont
importants, une fertilisation excessive ou inadaptée aux besoins physiologiques de la culture étant un facteur aggravant. Si l'on considère que la prolifération (et non pas la simple présence) des bio-agresseurs résulte d’un déséquilibre du système agricole, alors, en agriculture biologique, où il existe très peu de moyens de lutte directe, il est primordial de favoriser la régulation naturelle des bio-agresseurs et la
résilience du système face aux différentes agressions (biotiques ou abiotiques) :
  • en introduisant de la biodiversité en créant ou en permettant le développement d’un environnement des parcelles favorable à l’installation de la faune auxiliaire par la présence d’abris et de nourriture : bandes enherbées, haies fleuries, zones de végétation naturelle…
  • en complexifiant le système : parcelles de taille limitée, espèces et variétés cultivées diverses et adaptées au contexte pédo-climatique, rotations longues et diversifiées, associations d’espèces végétales ligneuses et herbacées, agroforesterie...

Quant à la maîtrise des adventices, elle se fait par des moyens mécaniques et/ou thermiques et par des techniques agronomiques : rotations, paillages, engrais verts, semis sous couvert. Ce principe fondamental de prévention est présent dans la réglementation européenne sur l’agriculture biologique : « la protection des cultures doit être basée sur la préservation de la santé des végétaux au moyen de mesures préventives, notamment en choisissant des espèces et des variétés appropriées et résistantes aux nuisibles et aux maladies, en assurant dûment une rotation appropriée des cultures, en recourant à des méthodes mécaniques et physiques et en protégeant les prédateurs naturels des nuisibles ». La réglementation est donc claire, l’agrobiologiste doit mettre en place toutes les mesures agronomiques nécessaires pour éviter
l’apparition et le développement des ravageurs et des maladies en donnant à la culture les moyens de se défendre par elle-même et en aménageant son environnement pour permettre la régulation naturelle des ravageurs et des pathogènes.

Ce chapitre est consacré aux moyens indirects qu’il est possible de mettre en oeuvre dans un système maraîcher afin de prévenir la prolifération des maladies et des ravageurs. Sont principalement abordés ici les aspects concernant l’agro-écologie (biodiversité fonctionnelle) et l’importance des choix variétaux. Les aspects agronomiques (rotations) ont un chapitre dédié. Les éléments spécifiques de chaque légume sont présentés dans les fiches techniques par espèce.

Pour aller plus loin :

  • MOYENS DE LUTTE DIRECTE POUR MAÎTRISER LES BIO-AGRESSEURS


Ce chapitre consacré à la lutte directe traite principalement des produits permettant de limiter (préventivement ou curativement) les dégâts aux cultures causés par les ravageurs et pathogènes –désignés sous le terme générique de bio-agresseurs*-. Il aborde les aspects règlementaires de l’utilisation des substances et produits de protection des cultures autorisés en AB. Cependant, l’application d’un produit n’est pas le seul moyen de lutte directe contre les bio-agresseurs, l’utilisation des filets anti-insectes
ainsi que les méthodes thermiques ont donc été également inclus dans ce chapitre. En effet, les premiers visent à perturber directement les ravageurs et à les empêcher d’atteindre les cultures qu’ils convoitent, et
les secondes (solarisation et désinfection vapeur) sont utilisées principalement en curatif pour détruire les pathogènes du sol ainsi que les adventices (graines et plantules). Rappelons que les moyens de lutte directe, notamment l’utilisation de produits biocides ne doit être envisagée qu'en dernier recours, lorsque les méthodes préventives se sont révélées insuffisantes pour contrôler les bio-agresseurs.

Pour aller plus loin :


T1 Chap2 Ravageurs Aeriens
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  • PRINCIPAUX RAVAGEURS DES LÉGUMES



En raison des conditions de production relativement intensives et artificialisées des systèmes maraîchers, notamment sous abris, les risques de prolifération de ravageurs sont importants. Les moyens de lutte directe disponibles étant très réduits, il est primordial de bien connaître la biologie des ravageurs, de mettre en place des mesures préventives pour éviter leur installation et d’effectuer une surveillance vigilante afin d’intervenir le plus précocement possible en cas d’attaque.
Les ravageurs spécifiques d’une espèce sont traités dans les fiches techniques espèce correspondantes.

Pour aller plus loin:



  • PRINCIPALES MALADIES DES LÉGUMES


En production maraîchère, les conditions de production sont souvent relativement intensives, notamment sous abris : fertilisation, irrigation, fréquence dans les rotations d’espèces d’une même famille botanique… sont propices au développement de maladies. Elles peuvent être fongiques, bactériennes ou virales et concernent aussi bien les organes aériens que les organes souterrains. Comme pour les macro-organismes, les relations entre les micro-organismes du sol, mais également à la surface (et dans) les organismes vivants, sont régies par des équilibres complexes. La prolifération d’une espèce aux dépens des autres est la conséquence d’une perturbation (plantation, repiquage, opérations culturales, blessures…) et/ou de conditions interne et/ou externe (température, humidité, carence ou excès en nutriment, monoculture, densité trop élevée…) qui vont favoriser le pathogène au détriment de l’hôte. Soit l’équilibre se rétablit naturellement, soit une intervention extérieure est nécessaire pour rétablir des conditions défavorables au pathogène ou pour le détruire directement. Les méthodes de lutte directe contre les maladies sont extrêmement réduites en agriculture biologique, la prévention et la gestion globale du système doivent être les moyens privilégiés pour maintenir les équilibres et éviter ainsi les proliférations de pathogènes.
Les cultures de légumes sont également menacées par des maladies virales, le plus souvent transmises par un insecte piqueur-suceur (puceron, aleurode ou thrips). La lutte contre ces viroses passe donc par la maîtrise de leur vecteur, pour les méthodes de lutte il faut donc se reporter au chapitre concernant les ravageurs.

En résumé:
Les maladies des légumes sont causées soit par des champignons, soit par des bactéries, soit par des virus.
  • Champignons des parties aériennes :
    • Mildious. Prophylaxie : rotations longues, fertilisation azotée correctement dosée, variétés tolérantes ou résistantes, effeuillage, plants sains. Lutte directe : cuivre
    • Oïdiums. Prophylaxie : mêmes conseils que pour les mildious. Lutte directe :
soufre, bicarbonate de potassium, huile essentielle d'orange douce
  • Anthracnose, Alternariose, Botrytis : méthodes préventives uniquement.
  • Champignons telluriques :
    • Sclérotinia (« pourritures blanches »). Prophylaxie : rotations, travail du sol, variétés. Lutte directe : champignon antagonistes
    • Fusariose, Verticiliose, Rhizoctone brun : méthodes préventives uniquement
    • Fonte des semis (complexe de plusieurs champignons) : méthodes préventives uniquement.
  • Bactéries pathogènes : essentiellement Pseudomonas sp. et Xanthomonas sp. Prophylaxie : semences et plants sains. Lutte directe : cuivre.
  • Viroses : les virus sont transmis aux plantes par l'intermédiaire d'un vecteur, le plus souvent un insecte piqueur-suceur (puceron, aleurode, thrips). Méthodes préventives uniquement : semences et plants sains, variétés tolérantes ou résistantes, lutte contre les insectes vecteurs.

Pour aller plus loin:

  • PROTECTION BIOLOGIQUE DES LÉGUMES


La définition de la protection (lutte) biologique donnée par les statuts de l’OILB est la suivante : « Utilisation par l’homme d’ennemis naturels tels que prédateurs*, parasitoïdes* ou agents pathogènes pour contrôler des populations d’espèces nuisibles et les maintenir en dessous du seuil de nuisibilité ».
Elle ne vise donc pas l’éradication du ravageur mais s’applique principalement à réduire sa nuisibilité. Elle peut aussi concerner le contrôle des maladies. Ce guide présente ses applications pour la protection des cultures mais elle est aussi utilisée en élevage pour combattre certains parasites du bétail, et dans des domaines non agricoles notamment pour lutter contre les espèces envahissantes. Son principal avantage est d’éviter d’utiliser des substances biocides* traumatisantes pour l’équilibre des écosystèmes, susceptibles de laisser des résidus dans les aliments et/ou l’environnement (eaux, sol, air), et potentiellement nocives pour l’utilisateur.
Contrairement à ce que le nom pourrait laisser penser, la protection biologique n’est pas réservée à l’agriculture biologique, elle est aussi largement utilisée en agriculture conventionnelle, notamment sous abris.
Dans ce chapitre, il sera principalement question de la protection biologique au sens strict c’est-à-dire lorsqu’il y a une intervention directe de l’agriculteur pour introduire un organisme capable de réguler voire réduire les populations des ennemis des cultures. Les méthodes indirectes visant à encourager la mise en place d’équilibres naturels et à favoriser la présence et le développement des auxiliaires indigènes* sont traitées particulièrement dans le chapitre sur la biodiversité fonctionnelle.

  • Résumé :
La lutte biologique ne vise pas l’éradication des ravageurs mais vise à contrôler leur population et à réduire leur nuisibilité. Elle n’est pas réservée à l’agriculture biologique, elle est aussi largement utilisée en agriculture conventionnelle, notamment sous abris.
Les principales méthodes de lutte biologique sont :
  • la lutte par conservation : il s’agit de préserver voire de favoriser les auxiliaires naturellement présents dans et aux abords des parcelles cultivées
  • la lutte par introduction-acclimatation : il s’agit d’introduire un auxiliaire non indigène* avec l’objectif qu’il s’acclimate et contrôle durablement un ravageur. Cette méthode présente des risques pour les écosystèmes : un auxiliaire aujourd'hui peut devenir un ravageur demain !
  • la lutte par lâchers d'auxiliaires indigènes (ou non indigènes mais dont on est certain qu'ils ne se maintiendront pas d'une année sur l'autre) :
    • Les lâchers inoculatifs : les auxiliaires sont introduits en petite quantité, l’objectif étant qu’ils s’installent dans le milieu et se multiplient rapidement. Pour que leur population atteigne un niveau suffisant avant l'apparition du ravageur, ils ont souvent besoin d'un hôte intermédiaire.
    • Les lâchers inondatifs : les auxiliaires sont introduits en grande quantité, ils sont immédiatement actifs sur les populations de ravageurs qui doivent être déjà bien présents au moment de l’introduction.
Les auxiliaires utilisés sont des insectes prédateurs ou parasitoïdes, ainsi que des acariens et des nématodes.
Certains produits phytopharmaceutiques utilisables en AB sont loin d’être anodins pour les auxiliaires, c’est le cas du spinosad, du soufre et des pyrèthres, qui peuvent avoir des effets dépressifs importants sur certaines espèces d’auxiliaires.

Pour aller plus loin:

Comment favoriser les auxiliaires de cultures sur mon exploitation ? from Solagro on Vimeo.