Intérêt des cultures intermédiaires dans la gestion des nématodes sous abri

  • (Y. Trottin, Ctifl)


La matière organique, outre sa fonction de nutrition et de structuration du sol, peut également contribuer à une meilleure gestion des bioagresseurs en particulier telluriques. Yannie Trottin (Ctifl) a ainsi présenté des résultats d’études sur l’intérêt des cultures intermédiaires dans la gestion des nématodes phytoparasites à galles, Meloidogyne spp, en cultures maraichères sous abri. Ces derniers constituent en effet un problème majeur dans les systèmes de cultures maraîchers en France, en plein champ et sous abris. Leur développement est favorisé par la succession de cultures maraichères sensibles et les rotations peu diversifiées. Par ailleurs, l’évolution vers une agriculture moins consommatrice de produits phytopharmaceutiques a entraîné le retrait de nombreuses substances actives ou leur remise en cause, notamment pour la désinfection des sols. Il est donc essentiel de travailler à la recherche de techniques alternatives afin de préserver le potentiel de production des exploitations maraîchères dont les sols sont contaminés par des nématodes. La biofumigation est une pratique alternative largement reconnue qui consiste à broyer et enfouir la biomasse végétale fraîche d’une culture ou d’un engrais vert en interculture, la décomposition de cette biomasse va libérer des substances toxiques qui peuvent détruire les bioagresseurs présents dans le sol et ainsi modifier la réceptivité des sols aux bioagresseurs. D’après des travaux conduits par l’APREL en 2012, la matière fraiche de trois variétés de sorgho testées est importante et variable selon les conditions de cultures (durée de la culture, nombre de coupes). La quantité de matière fraiche est également variable selon les espèces d’après des travaux du Ctifl dans le cadre du projet CASDAR cultures intermédiaires piloté par le GEVES (2012-2015), des différences notables ont ainsi été mises en évidence entre l’herbe du Soudan, le Millet Perlé et le sarrasin. Concernant le potentiel de biofumigation, celui-ci a été particulièrement étudié pour le sorgho fourrager car il contient la dhurrine, un précurseur du cyanure d’hydrogène (HCN), composé biocide non spécifique, actif sur les bioagresseurs du sol. En outre, c’est l’engrais vert le plus répandu en interculture d’été car il est bien adapté aux conditions climatiques, même sous abris. Les essais conduits par le Ctifl en 2013 et 2014 ont montré des teneurs en dhurrine variables selon les variétés, et plus élevées au début du cycle de développement. Néanmoins, l’apport de dhurrine augmente avec l’augmentation de la production de matière sèche. Ces résultats soulignent la nécessité d’adapter les techniques pour une meilleure efficacité de la biofumigation. Les observations faites par l’équipe de l’INRA Sophia Antipolis suggèrent quant à elles que la diminution du potentiel infectieux est le résultat d’une efficacité globale associant l’action « plante piège » (mauvais hôte) avant enfouissement du sorgho et l’action « biofumigation » après enfouissement. Par ailleurs, pour une meilleure efficacité, il paraît nécessaire d’intégrer ces cultures intermédiaires d’intérêt comme le sorgho fourrager dans un ensemble de leviers et dans une succession de cultures : dans cette optique, les travaux conduits dans le cadre des projets nationaux GEDUBAT (projet Ecophyto piloté par le Ctifl) et GEDUNEM (projet SMACH piloté par l’INRA de Sophia Antipolis) permettent d’intégrer des combinaisons de méthodes, un suivi sur le long terme, une observation à la fois des cultures et du fonctionnement du sol. A titre d’exemple, les expérimentations réalisées par l’APREL dans le cadre du projet GEDUNEM a permis de montrer une réduction de plus de 95 % des Meloidogynes du sol suite aux engrais verts, et un fort pouvoir de leur colonisation du sol sur culture sensible, ce qui implique que la diversité dans les rotations peut également contribuer à freiner le développement de ces ravageurs.
En conclusion, on pourra retenir le réel intérêt du sorgho pour ses propriétés agronomiques et son potentiel assainissant, mais des travaux sont à réaliser notamment sur le choix variétal. En outre, a été souligné l’intérêt du partenariat entre la recherche et développement pour adapter les techniques culturales sur la base d’une meilleure connaissance de la nature et de la dynamique des populations de bioagresseurs telluriques.


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